Inglourious Basterds
2009
Quentin Tarantino
Alors que sa légitimité est continuellement remise en cause entre ceux qui n’adhèrent pas à son style et ceux dont son succès critique et l’extrémisme de certains fans exacerbe, un fait est là : Quentin Tarantino revient immanquablement parmi les réalisateurs les plus influents et adulés. Pour autant, il n’avait jamais vraiment flamboyé au box-office, se relevant même à l’époque d’une sacrée claque puisque Boulevard de la mort n’avait même pas amorti la moitié de son budget brut. Doté d’un budget pratiquement identique, ce faux film historique va pulvériser tous ses précédents records en récoltant pratiquement treize fois plus : 321 M$, mais le succès fut loin de se limiter à un succès commercial. Les critiques furent exceptionnelles et le film récolta nombre de nominations dans les plus prestigieuses catégories, récompensant à chaque fois l’interprète de son général nazi (Christoph Waltz).
Si le film prend pour cadre la Seconde Guerre Mondiale, l’histoire racontée ici est très librement inspirée des faits de l’époques pour en tirer une histoire originale qui va largement dévier de la finalité qu’on connaît tous. Le film va se structurer autour d’une mission de grande ampleur puisqu’il s’agit tout simplement de mettre un terme à la guerre en assassinant tous les plus importants dignitaires allemands. En effet, dans le cadre de l’avant-première d’un film retraçant les exploits d’un soldat allemand (Daniel Brühl) qui a tenu seul face à centaines de soldats américains, les plus hauts gradés de l’armée allemande vont se réunir dans un même lieu. Juive sous couverture et gérante du cinéma où le rassemblement aura lieu, Shosanna (Mélanie Laurent) va imaginer un plan pour se venger de ceux qui lui ont prit sa famille. De leur côté, les américains vont mettre sur le coup les plus salops des leurs : les Inglourious Bastards (incluant Brad Pitt, Eli Roth puis rejoints par Michael Fassbender, espion britannique). En contact avec l’actrice allemande Bridget Von Hammersmark (Diane Kruger), ils vont tenter de s’infiltrer à la petite soirée.
On dirait que les scénaristes n’osent jamais. Si par hasard une fiction se déroule dans une époque précise, elle ne peut en faire abstraction et nous raconte alors quelque chose à l’ambition bridée par le caractère négligeable qu’elle peut avoir sur la grande histoire. Une barrière créative avec laquelle Quentin Tarantino s’est ici largement torché, et c’est probablement là le plus grand génie du film, mais ça n’en reste pas moins un détail. En effet, avant de diverger de la réalité historique qu’on connaît, le film enchaîne les sans-faute entre sa scène d’introduction mémorable où la tension connaît un extrême hors du commun, le pitch du chef de l’escouade pour la présentation puis celle qu’il fait devant les prisonniers, le tête-à-tête glaçant au restaurant ou encore la scène du bar. Les acteurs y sont époustouflants, le suspense éreintant et les dialogues si savoureux. Puis vient le lâché, l’exultation de toute cette pression en une déferlante de haine dont le réalisateur a le secret. Voir le regard de deux psychopathes au bord de l’éjaculation entrain de défourailler comme des tarés au point d’en oublier de sauver leurs propres vies, cette scène n’a pas de prix tant elle vous marquera à vie. Et que dire de la toute dernière scène ? De la fierté du réalisateur qui s’adresse directement à nous ? Du questionnement sur le code vestimentaire dans les îles ? Oh bordel cette claque !