Pokémon Détective Pikachu

Pokémon Détective Pikachu
2019
Rob Letterman

Ah les enfoirés ! Faire un projet sérieux autour de l’univers Pokémon, c’était l’une de mes idées dans laquelle j’avais consacré plus d’une centaine d’heures pour la création d’un jeu-vidéo : Le Chemin de l’immortel. Si l’univers coloré et enfantin de la collecte de monstres continue de se vendre par palettes malgré des mécaniques antédiluviennes et de nouvelles générations explorant de plus en plus les tréfonds de l’inspiration, du côté cinéma la ferveur s’est très vite essoufflée. Seul le Japon continue de diffuser dans ses salles un film chaque été, à la qualité souvent médiocre voir minable. Dans le reste du monde, à part quelques exceptions ponctuelles, la plupart des pays se sont contentés de sorties directement dans les bacs dès le quatrième opus. Sachant que sur 21 longs-métrages seul le tout premier aurait pu amortir un tel budget, venir à la charge avec un blockbuster au budget brut de 150 M$ était donc suicidaire, mais grâce au regain de popularité suite à Pokémon GO, le film a cartonné, pulvérisant tous les records de la franchise et dépassant la barre des 400 M$ (bien qu’en réalité, une fois ajouté les frais marketing et les taxes de distribution, la marge est quasi nulle).

Sorti en 2016 sur 3DS, le jeu éponyme est donc plus ou moins repris (aucune idée, jamais eu la console ni le jeu) pour ce qui sera une enquête sur la mort du père de Tim (Justice Smith), détective de police. Solitaire travaillant dans les assurances, Tim va tomber sur Pikachu (Ryan Reynolds), le partenaire de son père, alors qu’il explorait l’appartement du défunt en vue de libérer les lieux. Lui qui ne voulait plus entendre parler de Pokémon il va se retrouver malgré lui prit au milieu d’un complot sur une drogue rendant sauvages et agressifs les Pokémon.

Le concept du film est juste fou et n’a aucun sens. On suit un jeune homme froid et chiant qui fait équipe avec Deadpool. Clairement la patte de l’anti-héros se sent de bout en bout : on retrouve les mêmes blagues de culs, humour scatophile et compagnie. Oui oui, dans Pokémon, une licence qui s’adresse avant tout aux enfants, et c’est à mon avis la seule raison pour laquelle le film n’est pas classé R aux Etats-Unis entre le sang et les innombrables allusions sexuelles. Seulement ce qui marche dans un cas ne marche pas dans d’autres, et ce style d’humour passe plutôt mal ici. Côté scénario l’enquête est assez poussive et les rebondissements trop rocambolesques, mais heureusement que les acteurs sont bons. Le chef inspecteur (Ken Watanabe) fait un bon duo décalé très premier degré avec Snubble ; la journaliste (Kathryn Newton) est tout à fait charmante et Bill Nighy a de toute façon une classe monumentale quoi qu’il fasse. Petite surprise dans le casting : Rita Ora, qui en plus de composer une chanson pour la BO prête aussi ses traits à une scientifique. Pas un rôle suffisamment important pour briller ou se rendre ridicule, mais on s’étonnera de sa présence. L’histoire est donc assez faible, quelque peu rattrapée par de bons personnages.

Reste alors un point qui en inquiétait plus d’un : les effets spéciaux. Repéré sur internet pour ses dessins style réaliste de Pokémon, l’artiste en charge d’imaginer une version plus réaliste des Pokémon dans le film a fait un travail plutôt bon, mais si la réalisation et les jeux de lumière sont très bons, la modélisation pose soucis. On a dû mal à y croire une seule seconde, il semble manquer de la consistance aux créatures, qui malgré des interactions et incrustations qui forcent le respect, semblent clairement artificielles et ajoutées numériquement. On est loin de certains animaux photos-réalistes qu’on a pu voir dans des films comme L’Odyssée de Pi, ici l’illusion ne prend pas. On se laisse parfois impressionner comme lors du déplacement de montagnes, mais ça reste de la pure exposition qui ne sert à aucun moment l’histoire. Sans non plus passer un mauvais moment, légèrement investi par les personnages, intrigué par le concept même d’une version live et parfois amusé par les blagues salaces de Deadpool-Pikachu, le film déçoit un peu et la fin nous assure qu’aucune suite ne pourra jamais essayer d’étoffer l’univers.

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