The Legend of Zelda : Majora’s Mask

The Legend of Zelda : Majora’s Mask
2000 (Nintendo 64)
Eiji Aonuma, Yoshiaki Koizumi, Shigeru Miyamoto

Porte étendard, véritable icône de la Nintendo 64, Ocarina of Time est l’un des jeux les plus appréciés de l’histoire, et reste aujourd’hui encore porteur de valeurs intemporelles. Néanmoins, il ne fut pas la seule incursion de l’univers Zelda sur la console, et beaucoup ont même préféré cette suite spirituelle. Révolutionnaire, fou, malsain, le jeu ne s’était clairement pas reposé sur les acquis de la franchise, et il est vrai que l’effort d’originalité est louable, mais la réussite est loin d’être totale.

Graphismes : 20/20

Le premier fut une claque mémorable, cette suite a encore repoussé les limites techniques de la console, et il s’agit indéniablement du plus beau jeu de la plateforme. Sans jamais défaillir, n’accusant aucune des actuelles baisses de framerate, le jeu est une double réussite, à la fois technique et artistique. Techniquement irréprochable pour l’époque, le jeu ne souffre de presque aucun bug d’affichage ou de collision, les décors sont homogènes, variés et riches en détails, et les modèles 3D comptent parmi les plus beaux de l’époque. Concernant l’inspiration artistique, c’est encore plus probant. La ville centrale est entourée de quatre grands territoires, possédant chacun leur thème (marais, montagne enneigée, mer et montagne désertique), tous radicalement différents, à l’exploration différente et aux temples parfaitement adaptés. Avec un sens de la mise en scène incroyable, des boss colossaux (surtout l’effroyable premier et son style aztèque) et des lieux magnifiques, on en prend plein la vue. Comme quoi, l’ajout de RAM du « extension pack », ça change la donne.

Jouabilité : 12/20 mais potentiellement 19

Pour ce qui est de l’aventure à proprement parler, le jeu est encore meilleur que son prédécesseur. On reprend l’extrême liberté d’action, des possibilités d’interactions ahurissantes avec le retour des objets iconiques, mais le jeu y apporte en plus des idées assez exceptionnelles. Dans l’histoire, on gagne tour à tour des masques permettant de se changer en Mojo (petit être de bois), Goron (sorte d’ogre des montagnes) et Zora (poisson humanoïde), bouleversant le gameplay en fonction de la forme du personnage. Ainsi, le Mojo peut rebondir sur l’eau, s’envoler à l’aide de fleurs, tandis que le Goron a une force de frappe énorme et peut se rouler en boule pour écraser ou avancer très vite, alors que le Zora est doté de boomerangs et possède des aptitudes aquatiques fantastiques. Et avec plusieurs dizaines de masques aux propriétés uniques à collectionner, l’éventail de possibilités donne le tournis, mais c’est aussi ça le problème de l’œuvre : ça fait beaucoup, beaucoup trop. Le principe du jeu est qu’on a 72 heures avant la fin du monde (4 heures en temps réel), nous donnant à la fois un temps imparti pour effectuer les missions et des créneaux variables. Le fait qu’on perde notre argent, le contenu de nos bouteilles, nos munitions et l’avancement dans nos quêtes à chaque retour dans le temps n’est pas très grave, le jeu est généreux de ce point de vu. Non, le vrai problème c’est que certains événements ont lieu à des horaires précis, à un jour précis, avec des gens précis, et à une localisation précise. Résultat ? On ne sait jamais quoi faire, on se retrouve bloqué toutes les deux secondes, on passe à côté de presque tout, et de toute ma vie je n’ai jamais autant regardé une soluce, pour au final n’avoir réussi qu’une seule fois à avoir les 15 fées et ayant raté 31 quarts de cœur. Et si au moins il s’agissait d’un problème de difficulté, mais non. Quand on a des conneries de missions annexes du style donner au hasard spet poissons (nécessitant donc deux à trois voyages de bouteilles) à un aquarium pour gagner un quart de cœur, on nage en plein délire, et c’est franchement usant avec une logique aussi inexistante, comme devoir ré-affronter un boss pour débloquer des courses donnant accès à la poudre qui permet de forger la dernière épée. Et dire que la course de cheval est nécessaire pour obtenir un masque obligatoire pour avancer dans l’histoire…

Durée de vie : 16/20

Avec la solution en permanence sous les yeux, le jeu vous tiendra en ligne droite 20-25 heures, soit bien plus que Ocarina of Time. Sans solution, vous n’aurez même pas la possibilité de survivre à la fin du monde d’introduction, c’est dire. Et même en connaissant le jeu, la logique est tellement biaisée, fourbe, malhonnête, que vous ne trouverez jamais dans aucun temple que ce soit les 15 fées perdues, et encore moins les stupides 52 quarts de cœur, un nombre gigantesque qui empêchera certains d’atteindre la seconde dizaine. Personnellement, j’ai jeté l’éponge dès le second temple pour les fées, et je me suis contenté de 12 cœurs finaux, la difficulté relative autorisant un tel manque de préparation. Pour les masques, les trouver est aussi chiant qu’inutile, donnant accès à la toute fin au masque des fées, cheat code ambulant certes ultra classe, mais retirant tout plaisir de combattre. Heureusement que le jeu est bon, sans quoi une telle lourdeur aurait été rédhibitoire.

Bande son : 19/20

Allant de pair avec l’univers magnifique créé, l’ambiance sonore est une merveille du même ordre de grandeur que son légendaire ancêtre. Certains thèmes sont recyclés, mais les nouvelles compositions, surtout celles entourant le masque de Majora, sont célestes, et on apprécie grandement les variantes instrumentales du héros en fonction de sa forme (hyrulienne, Mojo, Goron, Zora). Les bruitages sont quant à eux toujours géniaux, donnant vie de façon détournée aux personnages.

Scénario : 17/20

Voici sans doute l’évolution la plus marquante dans la saga. L’univers a toujours été très riche, mais intrinsèquement l’histoire de base d’Ocarina of Time était bien trop conventionnelle, s’effaçant derrière l’expérience de l’aventure. Point de classique grand méchant ici avec une princesse à sauver : Link est mort et a été choisit pour guider les âmes des gens au purgatoire. Ayant sombré dans la folie suite au port du masque de Majora, Skull Kid a décidé de lancer sur ce monde un météore, voulant réduire en cendre ce lieu d’illusions où cohabitent diverses personnes plus ou moins conscientes de leur sort (le déni, Bourg-Clocher ; la colère, les Mojo ; le marchandage, les Gorons ; la dépression les Zoras ; et l’acceptation, la vallée des morts). Link a pour mission d’apaiser leurs âmes, tout en préservant ce lieu de passage en stoppant Skull Kid.

Note Globale : 15/20

C’est dramatique d’être obligé de mettre une note aussi basse à l’un des meilleurs jeux de l’histoire, mais certains défauts ruinent considérablement l’aventure. Il s’agit d’un des plus beaux jeux de sa génération, son gameplay est d’une richesse sans commune mesure, ultra complet et innovant, l’histoire est d’une immense maturité et nous tiendra en haleine des jours durant, et l’une des plus belle bande-son jamais conçue viendra mélancoliquement bercer nos oreilles. Potentiellement le jeu pouvait prétendre aux astres les plus flamboyants, mais en l’état il est pratiquement injouable. La progression est constamment freinée voir stoppée par des missions d’apparence annexes, à la résolution tellement tordue qu’il est parfois impossible de la trouver. C’est bien simple, sans internet à l’époque, j’ai dû me résoudre à abandonner le jeu après des jours à tester tout et n’importe quoi. Ne serait-ce que finir le jeu est si usant que vouloir fouiner, et obtenir chaque quart de cœur, masques et fée perdue, n’est que folie. Dans l’absolu le jeu est une œuvre majeure atteignant pour ainsi dire la perfection, mais impossible de fermer les yeux sur la désastreuse progression qui nous est imposée.

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